Abstract: Les manifestations de nationalisme et d’antisémitisme qui accompagnèrent la transition furent souvent interprétées en termes de retour du même. En témoignent des expressions chargées en connotations primordialistes telles que « retour des nations et du nationalisme », « réveil des nationalismes », « retour des vieux démons ». Effet « réfrigérant » de la domination du Parti-État, « vide idéologique » postcommuniste, telles furent, dans un premier temps, les explications communément invoquées pour en expliquer la réactivation.
C’est oublier que l’effondrement idéologique du communisme en Europe du Centre-Est a largement précédé celui du Mur de Berlin, et que les passions nationalistes n’avaient jamais été mises au frigidaire sous le régime communiste. Instrumentalisées par certaines élites du Parti comme par des fractions de l’opposition, elles n’ont pas attendu l’effondrement du Mur de Berlin pour se déployer. Reste que leurs manifestations récentes sont d’autant plus difficiles à interpréter en bloc que l’hétérogénéité sociologique de l’Europe du Centre-Est s’approfondit depuis la désintégration de l’Empire soviétique et que le concept même de nationalisme désigne parfois des réalités sociales et politiques diamétralement opposées.
En partant de l’idée que « le renouveau du nationalisme en Europe de l’Est est moins la cause de la situation actuelle que sa conséquence », nous montrerons à partir de l’exemple polonais, que celui-ci participe en réalité d’un phénomène classique de réinvention d’une tradition…
Abstract: Contre toute attente, l’antisémitisme est redevenu un phénomène politique et social d’actualité en France. Au-delà d’une simple persistance de préjugés anciens, il s’incarne depuis la fin de la guerre de 1939-1945 dans une expansion sans précédent des violences antijuives, allant des insultes jusqu’au meurtre. Sa reviviscence dans l’une des plus vieilles nations démocratiques d’Europe est le signe d’un malaise social et politique qui reste à interpréter. Quels sont les lieux, les milieux et les significations de cette animosité haineuse ? Doit-on y voir l’effet de la persistance de l’ancien ? d’un déplacement ? de la recomposition de formes inédites, portées par des acteurs nouveaux, dans un contexte pourtant gagné aux principes démocratiques ?
Alors même que l’ampleur du phénomène est de nature à mobiliser les sciences sociales pour l’élucider et aider à le combattre, cet antisémitisme s’est accompagné d’un certain déni : longtemps minimisé dans les médias, il peine à être reconnu dans le monde judiciaire et reste peu exploré par les sciences sociales. Cet ouvrage entend donc contribuer à l’analyse rigoureuse du phénomène, en proposant à la réflexion les textes d’historiens, de philosophes, de sociologues et de politistes.
Abstract: Quelques jours après l’attaque du Hamas en Israël, l’IFOP a réalisé pour le Journal du Dimanche, un sondage destiné à comprendre quelles étaient les représentations des Français à l’égard du conflit et de son impact sur une éventuelle importation de violences antisémites en France.
Premier enseignement de cette étude, le conflit au Proche-Orient apparaît comme particulièrement anxiogène. 86% des Français indiquent être inquiets (36% « tout à fait inquiets »), soit un niveau d’inquiétude proche de celui mesuré au début du conflit russo-ukrainien. Le sentiment d’inquiétude atteint son acmé dans certains segments de la population traditionnellement plus favorables à l’Etat Hébreu : les plus de 65 ans (44% de tout à fait inquiets parmi les plus de 65 ans contre 25% parmi les 18-24 ans) ou encore les électeurs de Valérie Pécresse (50% de « tout à fait inquiets »).
Deuxième enseignement de cette étude : les Français établissent clairement un lien entre les évènements au Proche-Orient et l’importation de violences antisémites en France. 48% des sondés estiment ainsi que les Français de confession juive sont plus en danger et 79% se déclarent inquiets que le conflit se traduise par une augmentation des actes antisémites.
Plus globalement, les Français identifient bien les « nouvelles formes d’antisémitisme » comme étant des causes à ce phénomène : 77% citent le rejet et la haine d’Israël, 76% les idées islamistes, soit des niveaux supérieurs à ceux mesurés pour les idées d’extrême droite (66%).
Dernier point, les pouvoirs publics bénéficient d’une certaine mansuétude dans l’opinion : 60% des Français estiment leur faire confiance pour assurer la sécurité des Français de confession juive. Jean-Luc Mélenchon suscite en revanche la défiance sur ce sujet : il apparait comme la personnalité politique qui suscite le moins de confiance pour lutter contre l’antisémitisme (17%), loin derrière Edouard Philippe (46%), Gerald Darmanin (42%), Marine Le Pen (42%) ou encore Emmanuel Macron (41%).
Abstract: 589 actes antisémites ont été recensés en 2021, soit une augmentation de près
de 75% par rapport à l'année précédente.
Les violences physiques ont augmenté de 36% comparativement à 2020.
‣ Les actes portant atteinte aux personnes représentent 45% des actes
antisémites, dont 10% sont des agressions physiques.
Selon les chiffres du Ministère de l'Intérieur, 73% des actes racistes portant atteinte aux
personnes sont dirigés contre des Juifs.
‣ Deux phénomènes inquiétants méritent une attention particulière :
๏ le nombre élevé d'actes antisémites commis dans la sphère privée (25% des actes
antisémites). Il s'agit essentiellement d'actes commis à proximité du domicile de la
victime, par un voisin d'immeuble ou par des personnes vivant dans le quartier.
๏ la proportion d'utilisation d'armes dans les agressions physiques (20%) et
menaces (10%) à caractère antisémite. Les armes les plus utilisées sont les couteaux
(9 cas) et les pistolets (5 cas). Les autres actes sont commis au moyen de carabines,
mortier de feu d’artifice, marteau, machette, pistolet à plomb, ciseaux.
‣ En 2021, deux pics d'augmentation des actes antisémites ont été relevés :
๏ en mai, pendant le déroulement de l'opération "Gardien des murailles" lancée par
Israël contre le Hamas. 5 actes antisémites ont été recensés en moyenne par
jour au cours de cette période. Il s'agit essentiellement d'insultes et de gestes
menaçants. Dans près de 1/3 de ces actes, le thème de la Palestine est évoqué.
๏ en août, pendant les premières mobilisations contre les restrictions sanitaires. Il
s'agit essentiellement d'inscriptions antisémites désignant les Juifs comme les profiteurs,
voire les instigateurs de la crise sanitaire.
Abstract: Lorsqu’un tribunal allemand à Cologne décida que l’ablation du prépuce pour motif religieux relève de coups et blessures volontaires, il ne pensait pas faire de politique. Lorsque les porte-parole des Juifs en Allemagne s’indignèrent que cette décision revienne en somme à bannir les juifs du pays, éclata un scandale politique national aux proportions mondiales. La chancelière Angela Merkel, rapporte-t-on, réagit en disant « Je ne veux pas que l’Allemagne soit le seul pays au monde dans lequel les Juifs ne peuvent pratiquer leurs rites. Sinon on passerait pour une nation de guignols ». En réalité ce n’est pas le ridicule que l’Allemagne craignait, c’était qu’après avoir tenté d’éradiquer les Juifs d’Europe, avec un certain succès, elle affiche une inhospitalité foncière à l’égard des Juifs. Mais il n’est pas fortuit que ce soit précisément en Allemagne que les droits de l’homme, les droits les plus individuels, soient scrupuleusement approfondis jusqu’à une conclusion politiquement intenable.
Le tribunal de Cologne, en pénalisant la berit milah, ne fait pas de politique, il protège l’intégrité physique de la personne et déclenche pourtant un scandale politique et des réactions en chaîne qui poussèrent le législateur allemand à amender dans l’urgence cette embarrassante décision. Et les juifs, lorsqu’ils circoncisent, que font-ils exactement ? Les anthropologues ont échafaudés un ensemble d’hypothèses sur la fonction de la circoncision. Les réponses varient selon le groupe étudié, mais souvent se chevauchent…
Abstract: Si l’on considère à deux ans de distance le débat sur la circoncision qui a secoué l’Allemagne en 2012, et du point de vue d’un combattant juif alors focalisé uniquement sur la circoncision juive de garçons, ma conclusion est que la circoncision a perdu son innocence. Certes, il y a toujours eu des livres de Juifs et des articles de non-Juifs pour s’en prendre à la circoncision ; et certes, il y eut de nombreuses discussions sur certaines pratiques, comme la Metzitza bePeh, la succion du sang par le mohel qui exécute la circoncision, par exemple quant à savoir si l’usage d’une paille en verre devait être rendu obligatoire – et malgré tout, la circoncision était un acte qui semblait aller de soi. Et quiconque souhaitait y renoncer pour son fils y renonçait.
Or, avec le débat sur la circoncision, qui a eu lieu dans une Europe centrale qui considère la religion avec méfiance dès qu’elle poursuit des buts autres que thérapeutiques, les choses ont changé d’un coup. Au prétexte des complications qui survinrent lors de la circoncision d’un garçon musulman, circoncision qui n’avait pour ainsi dire rien à avoir avec une berit milah (considérant l’âge du garçon, le lieu, les participants et les conditions de l’acte) – la circoncision a été prise dans une spirale de légitimations, qui n’avait pour ainsi dire rien à voir avec le rapport que la majorité des juifs entretiennent à l’égard de cette tradition, ou, pour employer ici le terme religieux, de cette mitsvah.
Abstract: Partons d’un constat, qui est à l’origine de notre volonté – avec Danielle Cohen-Levinas – d’organiser ce colloque pour le penser collectivement : en juin 2012, un jugement de la cour d’appel de Cologne déclarait la circoncision d’un enfant pour des raisons religieuses constitutive d’atteinte à l’intégrité corporelle. Cette pratique très ancienne et commune au judaïsme et à l’islam était dès lors interdite dans toute l’Allemagne. Quelques semaines plus tard, l’Autriche et les hôpitaux universitaires de certains cantons suisses décidaient à leur tour d’un moratoire sur les circoncisions rituelles. Dans cette Allemagne repentante depuis des décennies, les Juifs se sont retrouvés de manière inattendue et soudaine au cœur d’une polémique puissante qui les renvoyait, aux côtés des musulmans, à une pratique décrétée mutilatrice, archaïque, voire barbare. Ce rituel, fondamental au point que son interdiction rendait impossible la présence juive en Allemagne, selon le Zentralrat der Juden, semblait contredire et bafouer des valeurs essentielles de la République fédérale. Ce débat s’est élargi, puisqu’en octobre 2013 c’est le Conseil de l’Europe qui publiait un avis préconisant de légiférer dans le sens d’une limitation, voire d’une interdiction de la circoncision rituelle à l’échelle du continent. L’affaire est sérieuse, une incompatibilité entre l’Europe et ses minorités juive et musulmane est explicitement énoncée, ce fait est sans précédent depuis la fin du nazisme.
Abstract: Cette recherche envisage la tension entre une conception englobante de la religion portée par les juifs orthodoxes et une conception privatisée et plurielle en vigueur dans la société française, une société laïque et sécularisée, des années 1980 à nos jours. Cette tension est explorée depuis ces deux points de vue. D’une part, elle interroge comment les juifs orthodoxes s’organisent pour ménager l’espace jugé nécessaire à leur pratique religieuse. Pour ce faire, elle explore leurs besoins, leurs demandes, ainsi que les stratégies qu’ils mettent en œuvre pour les porter. D’autre part, elle soulève la question de la gouvernance publique du religieux. Pour ce faire, elle étudie la manière dont l’État laïc appréhende une minorité religieuse, qui semble aller à contre-courant du mouvement de fond de la sécularisation. A partir d’un protocole de recherche mixte, et en mobilisant la sociologie électorale, la sociologie de l’action collective, l’analyse des politiques publiques, et des outils de sociologie de la religion, elle teste la consistance de l’intégralisme des juifs orthodoxes dans la société française. Elle réfléchit ainsi à la gouvernance de minorités religieuses intégralistes, à partir d’un autre cas que l’islam, et distingue ce qui relève d’une religion en particulier ou de l’orthodoxie. Elle montre une érosion de l’intégralisme religieux, du fait de réponses défavorables des institutions publiques et de la sécularisation qu’il ne parvient pas à enrayer.
Abstract: Un nombre considérable de juifs a quitté la France dans la dernière décennie, sans que les paroles rassurantes émanant des plus hautes autorités de l’État aient pu arrêter l’hémorragie. Quant à ceux qui restent, ils ne peuvent éviter l’idée de devoir peut-être partir un jour, au regard des événements et d’un climat général dont chacun perçoit le poids.
La sociologie politique, curieusement, n’a que bien peu à dire sur un tel phénomène. Prolixe sur la question de l’immigration, elle est pratiquement muette sur le fait que la France ait pu ainsi devenir une terre d’émigration. Qu’est-il donc arrivé ? Pour le comprendre, l’invocation commode des tensions intercommunautaires et du radicalisme islamiste est bien loin de suffire. C’est une généalogie au long cours de notre situation qui est requise, une restitution des dynamiques complexes où sont intriqués, depuis la Seconde Guerre mondiale, les juifs, l’Europe et l’État d’Israël.
De cette manière, et de cette manière seulement, l’un des points les plus sensibles du malaise politique actuel peut enfin être affronté.
Abstract: Les travaux sélectionnés pour cette thèse de sociologie (4 ouvrages et 14 articles ou chapitres de livre) explorent deux thématiques différentes : les familles homoparentales et le vécu de croyants homosexuels. En dépit de leur éloignement du modèle exclusif de la parenté, un père, une mère pas un de plus, les familles homoparentales inscrivent leurs enfants dans une chaîne de transmission parentale, tant culturelle que généalogique. De même, les croyants homosexuels adhèrent aux valeurs de leur appartenance religieuse même s'ils contestent la légitimité de l'autorité institutionnelle de l'Eglise ou des rabbins. Dans les deux cas, il y a à la fois ébranlement de la norme et adhésion à un modèle légèrement différent, plus inclusif. Les homosexuels deviennent parents en élargissant les représentations de la parenté. Les homosexuels croyants parviennent à intégrer leurs dimensions identitaires antagonistes en se tournant vers des églises ou des communautés plus accueillantes ou en réinterprétant les textes problématiques. Dans l'un et l'autre cas, ils contribuent à construire des modèles compatibles avec les formes nouvelles de la famille et de la socialité religieuse. Les travaux sélectionnés pour cette thèse montrent que la réunion de dimensions a priori inconciliables -homosexualité et famille, homosexualité et religion - conduit à des innovations sociales non seulement à l'échelle individuelle, mais aussi à l'échelle sociale. Les institutions, qu'il s'agisse du droit de la famille ou des autorités religieuses ne peuvent rester complètement imperméables aux évolutions sociologiques auxquelles les expériences individuelles les confrontent.
Abstract: Consists of thematically organized texts by Trigano, previously published in various French on-line newsletters, broadcast on the French Jewish Radio J, and at various conferences. They analyze the phenomenon of the new antisemitism, including accusations in the French press against the Jews and Israel, boycotts against Israel, a typology of anti-Zionists, alter-Juifs (Jews who identify as Jews but define Jews through the hostile view of others), and the deconstruction of Judaism. Exposes the specificities of French antisemitism since 2000, especially in the context of postmodernist thought, which encourages the creation of parallel and diverging interpretations of the past, including World War II. Argues that Holocaust revisionism and denial have enabled Faurisson, inter alia, to attain huge media coverage. Emphasizes the role of the Internet in the politicization of history, and shows how the usurpation of Jewish history and heritage by the Left on behalf of the Palestinians has roots in Christian supersessionist theology. Notes that rejection of the Jews and Israel are also based on the claim that monotheism is the source of phallocracy. Characterizes the European Union as a new imperialist power, which destroys nation states and national identities, and rejects Jewish autonomy. Concludes that present-day antisemitism is a massive phenomenon, which threatens the foundations of modernity and European civilization. The very survival of the Jewish people is at stake.
Abstract: Depuis 1967, le conflit israélo-palestinien a souvent été un facteur de tension au sein de la société française. Racisme, antisémitisme, affrontements communautaires se nourrissent de l’interminable crise du Proche-Orient. Pour quelles raisons particulières la France est-elle plus sensible qu’aucun autre pays occidental aux échos d’un conflit lointain et localisé ? Dans ce livre informé, Denis Sieffert s’efforce de remettre en perspective les relations tumultueuses entre la France et Israël. Plus qu’une simple affaire de politique étrangère, le Proche-Orient agit comme un miroir pour la société française et les communautés qui l’habitent. C’est pourquoi toute prise de position prend un caractère passionnel. Depuis le parrainage d’Israël par la IVe République jusqu’au caillassage du Premier ministre Lionel Jospin à l’université de Bir Zeit, en passant par la fameuse déclaration du général de Gaulle en 1967 à propos du peuple juif « sûr de lui-même et dominateur », et le « sauvetage » de Yasser Arafat par François Mitterrand en 1982, les débats et polémiques ont souvent divisé l’opinion française et ses responsables politiques. Denis Sieffert explore ici le rôle du passé colonial français toujours douloureux, la relation difficile entre le sionisme et la République et, plus largement, le problème que soulèvent les doubles allégeances. Il rappelle les liens que les grandes familles politiques conservent, plus d’un demi-siècle après la naissance d’Israël, avec les protagonistes du conflit. Il montre en particulier que les socialistes, comme leurs ancêtres de la SFIO, restent souvent très liés à Israël, alors que les communistes, l’extrême gauche, les Verts et les altermondialistes sont, eux, engagés dans le soutien des Palestiniens.
Abstract: Le nombre d’ACTES antisémites (ACTIONS + MENACES) ayant donné lieu à un dépôt de plainte est en hausse de 74% en 2018 comparativement à 2017. Il est passé de 311 à 541 = Plus d’un Acte antisémite commis par jour.
Le nombre d’ACTIONS antisémites (Attentat ou tentative, homicide ou tentative, violence, incendie ou tentative, dégradation ou vandalisme) ayant donné lieu à un dépôt de plainte est en hausse de 89%. Il est passé de 97 à 183 comparativement à 2017.
Parmi les ACTIONS, les Violences physiques antisémites ont augmenté de 170% en 2018, 81 contre 30 en 2017.
= Plus d’une Violence physique antisémite commise par semaine.
En mars 2018, 11 mois après le massacre de Sarah Halimi (zal), une grand-mère juive est sauvagement assassinée chez elle. Mireille Knoll (zal) avait échappé enfant à la rafle du Vel d’Hiv. En 2018, les Français juifs, qui représentent moins de 1% de la population, ont subi 55% des Violences physiques racistes commises en France. Les adultes et les enfants juifs affrontent un quotidien oppressant, agressif et une violence continue.
Le nombre de MENACES antisémites (Propos, geste menaçant ou démonstration injurieuse, tract et courrier, inscription) ayant donné lieu à un dépôt de plainte est en hausse de 67% en 2018 comparativement à 2017. Il est passé de 214 à 358.
Précisons que plusieurs facteurs viennent encore majorer ces chiffres déjà dramatiques. La mesure des Actes antisémites est bien inférieure à la réalité car :
‣ La majeure partie des discours et propagandes antisémites a migré vers Internet ces dernières années. Or, la comptabilisation des Menaces n’inclut que quelques faits relevés sur Internet mais pas la pleine activité antisémite qui s’y propage.
‣ Le curseur de l’antisémitisme en France est allé tellement loin, jusqu’au terrorisme, assassinant même des enfants, des vieilles dames, que les témoins ou victimes de « l’antisémitisme du quotidien » manifestent une sorte de résignation et d’habituation. Ils ne déposent plus plainte pour des faits considérés comme « mineurs » comparativement aux violences physiques antisémites. Or leur gravité et conséquences désastreuses restent entières.
‣ De nombreuses victimes d’Actes antisémites disent ne pas porter plainte par peur de représailles.
‣ De nombreuses victimes d’Actes antisémites sont peu confiantes sur l’aboutissement d’une enquête et sur l’issue d’une procédure pénale.
• L'antisionisme et la haine d'Israël prolifèrent de façon décomplexée voire admise. Ils oeuvrent comme des paravents masquant, voire légitimant l’antisémitisme.
• L’opération Sentinelle, engagée en France dès janvier 2015, avait contribué activement et rapidement à une baisse conséquente en 2016 des actes antisémites, passant de 808 en 2015 à 335 en 2016, soit une baisse de 58%.
Depuis la levée de son dispositif statique, les Actions antisémites n’ont cessé de croître dans des proportions inquiétantes. Ayant démontré leur efficacité, le retour à des mesures de prévention et de protection
dédiées à la communauté juive semble donc urgent et nécessaire.
Abstract: Loin d’avoir disparu, la haine des Juifs est entrée dans un nouveau régime en se fixant sur Israël, cible d’une guerre médiatique de haute intensité. L’antisionisme radical, dont l’objectif est la destruction de l’État juif, représente en effet la dernière figure historique prise par la judéophobie. À ce titre, négatrice du droit à l’existence d’une nation, elle constitue l’une des principales formes contemporaines du racisme. Pour comprendre comment s’est accomplie la mondialisation de cette nouvelle configuration antijuive, l’auteur dissèque le nouveau discours de propagande des ennemis déclarés d’Israël tel qu’il s’est développé au cours des années 2000-2010. La nouvelle vision antijuive, qui consiste à « nazifier » les « sionistes » en tant qu’« agresseurs » et à « judaïser » corrélativement les Palestiniens en tant que « victimes », permet d’accuser les « sionistes » de « génocide » ou de « palestinocide ». Ce discours de propagande est replacé dans son contexte international, marqué par une menace islamiste centrée sur l’appel au jihad contre les Juifs.
Analysant divers matériaux symboliques exploités par la nouvelle propagande antijuive — images ou discours —, P.-A. Taguieff donne à comprendre comment et pourquoi la haine des Juifs, plus d’un demi-siècle après la Shoah, a pu renaître sous les habits neufs de l’« antiracisme » et de l’« anticolonialisme » et, grâce aux médias, se diffuser en recueillant l’assentiment d’individus parfois convaincus d’être étrangers à tout préjugé antijuif.
Abstract: En transformant les Juifs en citoyens, la Révolution française bouleverse leur statut. La logique révolutionnaire, hostile par principe aux corps intermédiaires, incite les Juifs à renoncer à leur structure communautaire propre. L'intégration à la Nation est désormais leur but : c'est seulement dans la sphère privée qu'ils peuvent préserver leurs traditions et leur fidélité.
Pierre Birnbaum ne se contente pas de retracer l'histoire des épousailles entre la France et ses Juifs, avec ses temps forts, ses moments de crise et ses grandes figures. Il développe une thèse originale : après avoir été longtemps l'agent de l'uniformisation républicaine et laïque, c'est aujourd'hui l'Etat qui incite les Juifs à se constituer en une communauté, largement « imaginaire ». Philosémitisme républicain et antisémitisme nationaliste se renforcent curieusement et « communautarisent par le haut » les Juifs français, tentés eux-mêmes de reconstituer, « par le bas », une communauté.
Le chemin de la Révolution française à Carpentras symboliserait-il le passage imprévu de la citoyenneté à la communauté ?
Abstract: Treize ans après la publication de son essai majeur, La Nouvelle Judéophobie, Pierre-André Taguieff signe une étude stimulante dans laquelle il explore et analyse les formes les plus récentes de la haine antijuive, portée par un antisionisme radical mâtiné de complotisme et une islamisation croissante de la cause palestinienne. La tuerie antijuive de l’« Hyper Cacher », porte de Vincennes, le 9 janvier 2015, s’inscrit dans l’année terrible commencée le 26 janvier 2014 avec la manifestation parisienne « Jour de colère », mais aussi dans la dernière vague antijuive mondiale qui a débuté en octobre 2000 et touché particulièrement la France. Les actions jihadistes des frères Kouachi et d’Amedy Coulibaly montrent que, pour les islamistes radicaux, deux raisons suffisent pour mériter la mort : être juif, être « islamophobe ». La judéophobie contemporaine se caractérise avant tout par sa diffusion planétaire, qui lui fait perdre une grande partie de ses traits nationaux. La diabolisation des Juifs traverse désormais toutes les frontières. Dès lors, la lutte contre la judéophobie doit elle aussi être globalisée.
Abstract: Growing up Jewish in Poland presents the findings of a study about the developmental trajectories of 17 children and adolescents from 14 families living in Poland who attended the Lauder-JDC International Jewish Youth Camp Szarvas (Hungary) for the first time at the time of the study (2015-2018). Resorting to a longitudinal analysis, the present study aims to examine what happens, over a period of three years, to a group of Jewish boys and girls that have experienced a Jewish summer camp for the first time in summer 2015. The study focused on the role that the summer camp itself plays in shaping a proactive Jewish life but also analyzed more globally other aspects that influence Jewish participation. What are the main factors that affect Jewish participation both on the kid’s and on the parents’ perspective? What are the possible “Jewish” trajectories of 13-to-16-year-old teenagers in Central Eastern Europe? Do they keep connected with Jewish life? If yes, how? What’s their scale of values? What are their priorities, their hopes, and their perceived future as they make their way from teenagehood to young adults?
The main methodological feature of this study lies in it being a qualitative, longitudinal, observational cohort study. In contrast to most studies that explore development retrospectively, this study involved interviewing first-time Szarvas campers and their families over a longer period, with up to three consecutive interviews per family over a period of three years. To our knowledge, this research experience is unique in Jewish Europe.
Abstract: Dévastée et démantelée par l’occupation nazie, lieu principal de la Catastrophe, la Pologne a un statut particulier pour la mémoire juive et la mémoire de la Shoah. Depuis une quinzaine d’années, un réexamen de cette époque est devenu possible. Avec la démocratie et l’intégration à l’Union européenne, on voit naître un vif intérêt pour cette histoire dans les nouvelles générations et de grands débats publics émergent. La recherche historique est libre, ouverte et riche. La culture et le patrimoine juif sont étudiés et restaurés. Des artistes en interrogent la mémoire. Des festivals, des journaux, des émissions de radio ou de télévision, des programmes éducatifs touchent la jeune génération. Une petite communauté juive reprend vie. Bien entendu, la mémoire du génocide et la responsabilité des témoins sont au cœur des commémorations et des discussions sur ce passé. La Fin de l’innocence entend faire connaître ce travail de la société polonaise sur elle-même et sur son passé. Texte de voyage, construit autour de l’évocation des lieux de mémoire, texte de conversations, qui présente des portraits entretiens des principaux acteurs de ce renouveau, et texte de réflexion, cet ouvrage est à l’image du foisonnement et des interrogations qu’il présente.
Abstract: La France n’est pas un pays raciste ou antisémite. Il n’y existe plus d’antisémitisme institutionnalisé comme cela fut le cas dans les années 40. Il faut donc éviter de dresser des comparaisons obscènes avec l’Occupation et la Shoah, mais on ne peut que constater que les violences, allant jusqu’à l’assassinat, et les menaces contre les juifs et leurs institutions, ont considérablement augmenté depuis l’année 2000.
Marc Knobel explique pourquoi les choses se sont envenimées à ce point, quelquefois dans l’indifférence des politiques et des médias. Il ne convient pas de faire de l’angélisme et d’ignorer la réalité. L’hostilité à l’endroit des juifs s’est largement développée chez les jeunes qui vivent dans des quartiers dits sensibles et qui, souvent discriminés ou victimisés, sont en quête d’identité et s’identifient aux Palestiniens.
Ils glissent très vite de l’antisionisme à l’antisémitisme, d’Israël à Juifs. Le conflit israélo-palestinien joue donc ici un rôle majeur. Notons que ce conflit sert aussi d’alibi à l’expression de l’antisémitisme dans des milieux plus privilégiés culturellement et socialement. De plus, les islamistes font des banlieues défavorisées le lieu préféré de diffusion de leurs idées. Dans les prêches ou à travers Internet, ils présentent une vision d’un Islam qui serait assiégé, menacé par les Américains, les Européens et les juifs.
Cette vision complotiste du monde est d’autant plus grave que de jeunes déshérités entendent et lisent régulièrement leur propagande, s’en nourrissent en pensant y trouver l’explication de leur désarroi dans une société qui n’a pas su les intégrer. Les antisémites pensent que les juifs sont protégés, ils imaginent qu’ils sont tous riches et puissants. Les vieux stéréotypes sont là. L’antisémitisme, tout comme toute autre forme de racisme, est inacceptable.
Il est une injure à la République et ses effets peuvent se révéler dramatiquement, car ceux qui utilisent et manient l’antisémitisme s’illustrent par leurs appels incessants à la haine, à la violence et au meurtre.
Abstract: La disparition de la quasi-totalité des Juifs de Pologne pendant la Seconde Guerre mondiale est due à leur assassinat systématique par les Allemands. Mais que sait-on des comportements de la population polonaise ? La paix revenue, que sont devenus les derniers survivants ? Que nous dit aujourd’hui l’irruption de ce passé dans la société polonaise ? Comment vivre avec la mémoire d’Auschwitz, de Treblinka, de Belzec, autant de mémoriaux situés en Pologne ?
Depuis une quinzaine d’années, des historiens de ce pays ont montré combien il était difficile aux Juifs qui tentaient d’échapper aux tueurs de trouver appui auprès des populations locales, surtout en milieu rural, tant en raison de la politique de terreur menée par l’occupant que de l’hostilité de la société polonaise à l’égard des Juifs. Leurs travaux font désormais autorité dans le monde entier. Pourtant, depuis quelques années, les autorités de Varsovie mettent en œuvre une « politique historique » qui vise à minorer, voire à nier, la participation de franges importantes de la population polonaise à la traque des Juifs.
Sur place, malgré les embûches et les intimidations, les historiens travaillent, publient, organisent des colloques, forment des étudiants. Les auteurs réunis dans cet ouvrage témoignent de la vitalité de cette historiographie. Faire connaître aujourd’hui la fécondité scientifique et la portée critique de la nouvelle école historique polonaise est une exigence intellectuelle, morale et politique.
Abstract: [Edited from press release]
The AJC Paris study was conducted by IFOP, a leading polling firm, in partnership with Fondapol, a major French think tank. They polled 505 French Jews and 1027 French people between October 14 and November 19, 2019.
As antisemitism in France continues to spiral, Jews and the general population in France agree on the magnitude of the problem, according to the American Jewish Committee (AJC) Paris survey of perceptions of and experiences with antisemitism in France.
But alignment on the antisemitism threat to French society, and the government’s weak responsiveness, does not mitigate the fears of Jews about their safety and future in France.
Nearly three-quarters, 73%, of the French public, and 72% of Jews, consider antisemitism a problem that affects all of French society. 47% of the general public and 67% of the Jewish respondents say the level of antisemitism in France is high, while 27% and 22%, respectively, say it is low.
While 53% of the general public say antisemitism has been increasing, and 18% decreasing, in recent years, 77% of Jews say it has increased and 12% decreased.
The AJC Paris survey found that 70 percent of French Jews say they have been victims of at least one antisemitic incident in their lifetime, 64% have suffered anti-Semitic verbal abuse at least once, and 23% have been targets of physical violence on at least one occasion, with 10 percent saying they were attacked several times.
The continued spiraling of antisemitism in France has led significant percentages of the Jewish population to take protective actions. More than one-third, 37%, refrain from using visible Jewish symbols, 25% avoid revealing their Jewish identity in the workplace, and 52% have considered leaving France.
Overall, 44% of the Jewish sample say the situation for French Jews is worse than a year ago, only 11% say it is better and 42% no better or worse.
The youngest Jews, ages 18-24, are on the “front line” more than older cohorts in confronting antisemitism. 84% of them have suffered at last one antisemitic act, compared with 70% of all respondents; 79 percent had suffered verbal abuse, compared with 64% of all respondents, and 39% faced an act of physical aggression, compared with 23% of the full Jewish sample.
Visibly religious French Jews feel the most vulnerable, with 74% of them saying they had been a victim of at least one act of verbal abuse, compared with 64% of the full Jewish sample.
The main locations where antisemitic incidents occur the most are in the street and school. 55% said they had been insulted or threatened on the street, and 59% said they had suffered physical abuse in the school.
54% were victims of verbal abuse, and 26% had been victims of antisemitic violence in schools.
But equally disturbing is the finding that 46% said they had suffered anti-Semitic verbal abuse in the workplace.
Regarding the responsiveness of elected officials, Jews and the general public agree. Only 47% of Jews and 48% of the general public have confidence in the President of France tackling antisemitism, 46% of Jews and 41% of the public in the French government, and 58% of Jews and 56% of the public in local elected officials
Abstract: À travers un retour sur nos terrains ethnologiques respectifs, nous nous proposons de comprendre comment se construisent les espaces du culte dans les rapports de genre. Ces terrains sont situés dans la périphérie parisienne, à Sarcelles, qui a connu une concentration importante de « populations juives », émigrées d’Afrique du Nord, depuis une ou deux générations; à Marseille et dans sa périphérie, première région où les « populations musulmanes » émigrées se sont installées en métropole, qui aujourd’hui sont majoritairement d’origine maghrébine et comorienne. Mais ils sont essentiellement circonscrits par des pratiques juives et musulmanes qui peuvent être multisituées et plurielles davantage que par des sites particuliers.
Nous souhaitons entrer dans les rapports de genre autrement qu’à partir des rapports constitués, ceux qui attribuent, en particulier dans l’univers religieux, des places différentes aux hommes et aux femmes contribuant à construire des positions et des identifications sexuées, conscientes ou non. Nous interrogeons donc les positions affichées, montrant la dynamique des relations, des jeux, des non-dits, prenant en compte les interactions entre les deux positions sexuées. De même, tenant compte de la façon dont les sujets construisent l’espace du culte, nos contributions respectives portent sur une ethnologie du quotidien, privilégiant l’étude des interstices et des entre-deux établissant ainsi une comparaison entre nos deux terrains par l’analyse d’axes transversaux.
Nous entendons « espace du culte » au sens d’un espace, qui sans être nécessairement construit à cet effet, est cependant institué et clairement défini spatialement et temporellement. Nous ne restreignons pas l’espace du culte à celui de la synagogue ou de la mosquée, d’une part parce que les édifices officiels sont trop étroits pour contenir la masse des fidèles qui investissent d’autres lieux ; d’autre part, parce que dans le judaïsme, comme en islam, les femmes ne sont pas obligées de fréquenter les lieux de culte au même titre que les hommes. Nous analysons donc plusieurs types d’espace – intermédiaire, interstitiel, privé mais sacralisé par des rituels – ainsi que les modalités de leur investissement. Ceux qui sont officiellement dédiés au culte doivent leur caractère religieux à la pratique collective permettant au groupe de faire communauté le temps d’un office. Mais ces lieux sont investis aussi par des relations sociales profanes et marqués par une alternance de temps religieux et de temps ordinaires. La multifonctionnalité des espaces du culte induit des spatialités mobiles liées aux diverses temporalités. Les temporalités, dans les espaces du culte, alternent temps ordinaires et temps religieux. Il arrive que des interactions sociales liées aux temps ordinaires interviennent dans les temps religieux et inversement. Les temporalités ne sont donc pas fixes mais aussi fluctuantes que les espaces sont poreux.
Au delà des règles dogmatiques légiférant l’accès des observantes juives ou musulmanes aux espaces du culte et qui contribuent à assigner un statut différencié aux femmes, nous verrons que la position et les identifications sexuées se construisent aussi dans l’interaction à l’autre.
Dans cette contribution, nous n’avons pas cherché à neutraliser le genre des chercheures pas plus que celui des sujets. Les situations vécues ont des effets sur l’ethnologue qui l’amènent à négocier et reconstruire constamment sa posture. Elles sont décrites ici comme des situations interstitielles, « d’entre-deux » ; comme des révélateurs de la construction sociale des genres, d’enjeux de statuts et de pouvoir qui nous informent sur le contexte « minoritaire » de l’islam et du judaïsme dans la société laïque française.
Abstract: Cet ouvrage, issu d’une recherche originale, présente une approche comparative, qui reste encore peu étudiée, sur les pratiques religieuses contemporaines des femmes juives et musulmanes. Chaque chapitre, rédigé « à quatre mains » par un(e) spécialiste du judaïsme et l’autre de l’islam, met en lumière convergences et divergences dans une analyse croisée de thématiques communes ayant trait au féminin. Les textes posent les questions de l’accès des femmes juives et musulmanes à l’espace du culte (mosquée, synagogue) et aux textes religieux (Torah, Coran, Talmud, Hadith), à leur étude et à leur interprétation, donnant lieu à de nouvelles exégèses féminines et à l’émergence de nouvelles fonctions religieuses (imams musulmanes, femmes-rabbins et autres rôles rituels) ; les débats sur le droit de la famille (mariage et divorce) et les stratégies de contournement de certaines normes ; les problématiques liées à la sexualité, la pureté, l’homosexualité féminine, l’avortement et la reproduction médicalement assistée, dans les textes sacrés et les pratiques des femmes dans l’islam et le judaïsme aujourd’hui.