Abstract: Depuis 2012, l’histoire de la mémoire du génocide des Juifs est étudiée en terminale (série L, ES) dans le cadre du chapitre portant sur « L’historien et les mémoires de la Seconde Guerre mondiale ». Si les enseignants sont sollicités chaque année à l’occasion de journées commémoratives pour transmettre à leurs élèves la mémoire de la Shoah, porteuse d’un enjeu civique, l’introduction dans les programmes de ce sujet d’histoire relève d’une ambition pédagogique qui doit nécessairement s’articuler à la recherche scientifique. Dans cette perspective, cet article fait le point sur les récentes avancées historiographiques concernant l’histoire de la mémoire du génocide des Juifs en France qui permettent d’affiner un découpage chronologique que plusieurs manuels scolaires présentent de façon caricaturale. Il convient ainsi de remplacer le schéma narratif classique polarisé autour de « oubli/mémoire/temps du devoir de mémoire » par une périodisation qui prend en compte les traces -éparses mais significatives- de la mémoire du génocide dans la société française dès les années 1950, ce qui relativise fortement la thèse de son oubli. Les années 1970 et surtout 1980 sont marquées par des mises en récit publiques du génocide qui le situent dans un horizon commun de plus en plus partagé en le référant à des enjeux contemporains (lutte contre le négationnisme et l’antisémitisme, lutte contre l’extrême droite, reconnaissance et réparations dues aux victimes, reconnaissance officielle de la participation active de Vichy, exercice de la justice pour les crimes contre l’humanité). La prise en compte de cette mémoire dans les années 1990 par un État qui reconnait sa responsabilité historique dans le crime génocidaire entraîne de nombreuses actions publiques qui se déclinent sous différentes formes (commémorations, mémoriaux, voyages scolaires). L’Ecole est alors mobilisée comme un acteur privilégié de la transmission de cette mémoire qui est investie d’enjeux éducatifs fondés sur la promotion des valeurs des droits de l’homme et du vivre ensemble.